Chère petite famille,
Nous sommes donc partis de Tomorden pour Solaris ce matin. La route a été bonne, nous n’avons pas croisé grand monde, mais surtout, nous n’avons pas rencontré de problème. Je vous rassure, nous sommes bien équipés pour le voyage. De plus, mes compagnons sont d’aspect rustique. Je pense que ça nous évitera des rencontres malencontreuses.
A Solaris, nous sommes arrivés vers midi dans une bourgade à l’ambiance en demi-teinte. Le chef du village est un ancien prêtre, nostalgique des anciens cultes. Les tisserands sont moroses car leurs araignées se portent mal. La pythie attire de nombreux voyageurs, sans que les aubergistes y trouvent leur compte. L’atmosphère était donc spéciale, mais pas forcément pesante.
La pythie ne consultant que le matin, nous avons décidé de rester la nuit à Solaris afin d’avoir la chance de la consulter le lendemain. Mes compagnons en ont profité pour se pencher sur le problème des araignées. Mais attention, quand je dis araignées, je veux dire araignées monstrueuses. Pas les grosses araignées de la grange, mais les grosses araignées des forêts, comme les éclipsantes ou les araignées sabres des légendes. Elles n’avaient pas l’air agressives, certes. J’ai quand même préféré retourné à l’auberge. Les deux trappeurs et le nain sont donc partis à la recherche de la cause de leur problème (des plaies ouvertes pouvant mener à la mort). Après une longue marche, ils sont tombés nez à nez avec un arachnophage. C’est un énorme insecte volant qui utilise les araignées pour pondre. Pas très ragoûtant et particulièrement dangereux, paraît-il. Ils ont fait le choix, sage à mon avis, de ne pas le confronter et rentrer expliquer la situation aux villageois.
Après ces aventures, nous avons profité d’une bonne nuit à l’auberge. Ce fut l’occasion d’en apprendre un peu plus sur chacun. Par exemple, le nain, Ekna, est en fait à la recherche d’un ami de plus de vingt. Et c’est cet ami à qui était destinée la lettre d’engagement. Notre trappeur qui cache son visage a aussi acheté un masque, une longue discussion et de nombreux essais avec le marchand ont été nécessaires. Que l’on ne me dise pas que je suis une fille superficielle après ça. Plus sérieusement, le groupe est gentil et pour le moment, personne n’a critiqué mes performances vocales, pas toutes réussies.
Enfin … Le lendemain, avant de partir pour Auctermunty, nous nous sommes arrêtés chez la pythie. Elle nous a proposé un tarot divinatoire. Bon … Si je dois faire court, vous ne serez pas surpris d’apprendre que je suis impatiente … Pour le meilleur, comme pour le pire.
Le trajet vers Auctermunty s’est bien passé. Nous avons mangé le long de la rivière avant d’arriver en fin de journée. Le village est un petit hameau au milieu des bois. Nous avons un peu discuté avec les habitants, qui sont assez suspicieux, bien que cordiaux. En tout cas, quand nous posons des questions sur la possible existence d’un temple dans les environs, les gens se braquent. C’est d’autant plus étrange que tous les érudits avec qui nous avons discuté jusque-là nous en donnent une description cohérente : à flanc de falaise, proche de la rivière, de taille importante et abandonné il y a un siècle. Enfin … Nous avons été invités à dormir dans une grande bâtisse au fond du village, c’est donc là que nous nous sommes installés.
Ekna et moi avons profité du temps avant la nuit pour jouer avec les enfants du village. Ils ont l’air insouciants, mais nous ont tenu des propos inquiétants : les bois seraient le lieu de rendez-vous de personnes encapuchonnées. Nos deux autres compagnons sont partis explorer les environs qui se sont avérés très dangereux. En effet, ils ont été chargés par une harde de sangliers. Ils s’en sont sortis de justesse.
Le lendemain, le groupe s’est encore séparé. Les trappeurs sont partis remonter la rivière pour trouver le temple. Ekna et moi sommes retournés jouer avec les enfants pour en savoir plus sur ces mystérieux individus encapuchonnés. Au final, Ekna a identifié une piste qui mêle traces de bottes et d’animaux. Les enfants nous ont confirmé que les mystérieux individus passés par là. Nous avons profité de la pause de midi et retour des enfants auprès de leurs parents pour l’explorer prétextant un soudain besoin de me faire une couronne de fleurs.
De leur côté, Minzu et Merh'Elin ont opté pour un long et discret détour afin de remonter la rivière sans être remarqués. In fine, nous sommes arrivés au même au moment devant le temple. Nous n’avons pas eu le temps de nous saluer qu’une bête, mi-ours mi-hibou, s’est jetée sur Merh'Elin. Tout est allé très vite, Ekna a sorti son marteau pour lui assener des coups à la tête pendant que Minzu et moi avons tiré autant de flèches que possible. En quelques instants, la bête était à terre, mais Merh'Elin a pris un vilain coup.
Une fois la tension retombée, Ekna a soigné Merh'Elin et nous avons fait le tour du temple. Il est en ruine, mais deux voies d’accès vers l’intérieur semblent possibles : des vitraux en hauteur et une grotte dans laquelle des traces de bottes s’enfoncent. Après ce constat, la nuit approchant, nous avons décidé de rentrer au village en cueillant des fleurs pour m’en faire une couronne.
Nous avons dédié la journée du lendemain à la préparation de l’exploration du temple. Minzu et Merh'Elin sont partis se cacher à proximité du temple et de la clairière, respectivement. Leur objectif était d’apercevoir les hommes encapuchonnés pour en savoir un peu plus sur eux. Ils y auront passé toute la journée et une partie de la nuit, mais auront fait chou blanc, ou presque. En effet, Minzu a rencontré une troupe de trappeurs elfes à la recherche de la créature que nous avions rencontrée la veille. Mais rien de très concluant. De notre côté, avec Ekna, nous avons continué à sympathiser avec les locaux. Nous avons proposé des ateliers jeux, tour de poney, pâtisserie. Pour ce dernier, j’ai essayé de refaire une recette que j’avais appri dans mon enfance (les petits biscuits au miel). Bon … Ils n’étaient pas mauvais … Mais ils n’étaient pas bons non plus. Ekna a voulu tenter une recette avec des herbes et des graines. Mais nous n’en avions pas, après un imbroglio improbable, il s’est retrouvé à se faire proposer des feuilles de sang dans une arrière-boutique. Nous avons évité tout ça.
Le lendemain, et sans plus d’information, nous sommes partis en direction du temple avec notre monture. Une fois face au temple, nous avons d’abord essayé de passer par le trou dans l’ancien vitrail. Nous avons tenté d’escalader après avoir accroché un grappin. Ekna est très fort avec les cordes, on sent le véritable marin. Mais la corde l’a trahi et s’est démise du grappin quand Merh'Elin s’en est saisi. Au final, une perte de temps, mais rien de plus.
Nous nous sommes donc aventurés dans la grotte. Elle était visiblement d’origine animale, mais aménagée par des humains. Après quelques dizaines de mètres, nous sommes ressortis dans un grand hall en forme de croix. Il était majestueux, quoiqu’abîmé. Il y avait des statues d’animaux de très grande taille et très réalistes (hibou, belette, …) et un bel arbre au centre. Il y avait un petit autel pour déposer des offrandes, j’ai mis une pièce d’argent et l’arbre s’est agité. Mes compagnons ont fait de même. L’endroit était vraiment magnifique et l’acoustique très bonne. Ca m’a rappelé les chants de ma jeunesse. Je n’ai pas résisté, j’ai chanté.
Pendant ce temps, mes compagnons ont exploré les lieux et trouvé un passage dérobé. Il menait vers un couloir lugubre et en très mauvais état. Ekna ouvrait la marche et est tombé dans un trou avant qu’une pierre ne se décroche du plafond. Il l’a évité de justesse par un bond en avant d’une ampleur inattendue pour un nain. Nous sommes ensuite arrivés à l’entrée d’une pièce occupée par des champignons énormes. Ils étaient violets et avec des lianes qui ont essayé de nous attraper. Plus malins qu’eux, nous nous sommes repliés et avons opté pour les brûler, tout simplement.
Une fois au fond du couloir, nous avons poussé une porte qui donnait sur un cirque entouré de colonnade. En son centre, il y avait un orme gigantesque. Les rayons du soleil filtraient à peine entre ses feuilles. Mais nous n’avons pas eu le temps de l’admirer. Deux ankhegs sont sortis de terre et ont attaqué mes compagnons. La séquence qui a suivi était très confuse. Minzu et moi avons essayé d’aider Ekna et Merh'Elin à en venir à bout. Mais ils étaient sacrément robustes. Je ne crois pas que nos flèches aient vraiment touché leurs cibles et les carapaces de ces monstres les ont plusieurs fois fait ricocher sur nos amis.
Mais le plus impressionnant était cet arbre, il avait en son sein une lumière mauve. Elle est devenue très intense et l’arbre s’est mis en mouvement. Il a balayé toute la zone avant d’amorcer un mouvement de retour. Ekna et Merh'Elin qui venait de mettre à terre la première créature ont pu éviter les branches de justesse. Au moment de refaire le même mouvement en arrière, un grand faucon avec un bec d’un orange éclatant s’est envolé de l’arbre avec un sceptre entre ses serres. Soudain tout s’est arrêté.
Une fois le calme revenu, mes compagnons ont pansé leurs plaies et nous avons repris l’exploration des lieux. Tout était en très mauvais état et nous n’avons pas trouvé grand-chose dans les parties communes encore accessibles. J’ai pu me glisser dans ce qui restait des chambres pendant qu’Ekna déblayait l’accès à ce qui se relèverait être un laboratoire. Les chambres ne recelaient rien d’intéressant, à peine quelques parchemins. Le laboratoire, par contre, comptait quelques gemmes de blizzard de petite taille et un anneau potentiellement magique. Malgré des fouilles extensives, nous n’avons rien trouvé de plus. Plus nous passions de temps dans ce temple, plus j’étais convaincue que l’autel au milieu de la salle prière était l’endroit où nous aurions le plus de chance de trouver quelque chose.
Après plusieurs heures, nous avons décidé de prendre le chemin du retour. Nous sommes donc repassés devant cet autel. Il y avait bien une fente qui visiblement donnait accès à quelque chose. Mais impossible de l’ouvrir. Après une longue et houleuse discussion avec les membres du groupe, ils ont conclu qu’il ne fallait pas aller plus loin et ne pas forcer pour l’ouvrir. Bon … Vous vous doutez bien que n’étant pas d’accord, je suis allé chercher notre pied de biche et utilisant ma grâce naturelle, j’ai pu me placer derrière l’autel sans que l’on me remarque. Je l’ai donc ouvert et voilà ! Une gemme presque trop grande pour que je puisse la prendre dans la main. Alors, oui, quelques esprits chagrin diront qu’au même moment les statues de la pièce se sont animées et ont tenté de s’en prendre à nous. Mais nous n’avons eu qu’à courir pour les éviter et sortir indemnes. Donc rien de bien méchant et un véritable trophée à exhiber auprès de notre commanditaire.
Une fois dehors, nous sommes tombés nez à nez avec les villageois qui nous ont expliqué toujours vénérer l’ancienne déesse de la forêt. Ils n’ont apprécié pas que nous aillions abîmé le temple et nous ont laissés partir après moult discussion et, peut-être la chute un animal pétrifié sur une partie de leur groupe. Mais là encore, c’est présenter les éléments dans un contexte fallacieux. Ils vénéraient un ancien dieu, c’est illégal. Point final.
Bon … Bien entendu nous ne nous sommes pas attardés et partant en milieu d’après midi, nous avons dû faire une halte sur le chemin du retour. La clairière que nous avons trouvée était jolie, les loups qui nous ont attaqués, un peu moins. Mais les trois garçons les ont repoussés le temps que j’allume une lanterne et en abatte, moi aussi, un.
Malgré toutes ces péripéties, je vous rassure, je vais bien. Pas une seule égratignure. Nous sommes de retour à Solaris où les gens nous acclament presque comme des héros, car mes compagnons ont diagnostiqué le problème d’arachnohage que le conseil est venu résoudre en vitesse. Pour le moment nous nous reposons. La prochaine étape est de prendre la route pour la capitale pour raconter tout cela à notre commanditaire. Ne repassant pas par Tomorden, je vous fais parvenir cette lettre par un porteur. J’espère que cette lettre vous parviendra vite.
Embrassez fort Béall, Aaron et Elisa pour moi.
Votre Aldéia.